Si le grand frère brugeois a une fois encore été sacré champion de Belgique, les voisins du Cercle ont eux aussi vécu une année pour le moins extraordinaire. Leur entraîneur, Miron Muslić, y est pour beaucoup. Leur approche déterminée et pragmatique a su rassembler les joueurs pour donner naissance une équipe soudée qui s’est surpassée semaine après semaine. Résultat ? Une superbe quatrième place au classement final et une qualification au deuxième tour préliminaire de l’Europa League.
Vers le sommet, lentement mais sûrement
Comment passer, en un an et demi, de candidat à la descente à une équipe jouant au niveau européen ? Une prestation historique pour le Cercle Bruges, qui ne s’est toutefois pas concrétisée en un jour comme l’explique Miron Muslić : « Dans le monde du football, les choses ne se passent pas ainsi. Vous avez chaque semaine une nouvelle chance de gagner ou de perdre. D’où l’importance de vous préparer soigneusement pour chaque match et de continuer à travailler, en procédant étape par étape. Il est essentiel de n’en sauter aucune, surtout avec une équipe aussi jeune que la nôtre. »
Donnant-donnant
Si la force et l’intensité ne manquent pas dans une si jeune équipe, elles ne sont pas pour autant un gage de réussite. Comment l’entraîneur motive-t-il ses joueurs à s’accrocher et à affronter la saison match après match ? « Nous sommes conscients, au niveau du staff d’encadrement, d’être particulièrement exigeants », admet Miron Muslić. « Notre équipe a le plus gros rendement physique de Belgique. Ce n’est pas précisément l’aspect du sport que les joueurs préfèrent. Mais grâce à la culture spécifique du travail que nous avons instaurée, tout le monde trouve aujourd’hui normal de donner le meilleur de lui-même. C’est donnant-donnant : on ne peut demander aux joueurs de repousser leurs limites qu’à condition d’être prêts à leur offrir quelque chose en retour. Le leadership par l’exemple, donc. »
La complexité devient simplicité
Fixer des objectifs précis et expliquer clairement aux joueurs ce que vous attendez d’eux est l’un des secrets de la réussite du Cercle, poursuit l’entraîneur. « Tout commence par la communication. J’essaie de communiquer un maximum, tout en restant aussi ouvert et direct que possible. Mes joueurs savent que je suis là pour eux et ce que j’attends d’eux. Parallèlement à la communication, la transparence est également de mise. Le football peut être très complexe, mais très simple aussi, si vous prenez la peine d’expliquer et de communiquer clairement vos attentes. »De la communication au coaching
Tout le monde sait que le feed-back fait partie intégrante du coaching. Miron Muslić l’explique de manière très concrète : « Quand un joueur fait une mauvaise passe, quel est l’intérêt de lui en faire la remarque en long et en large ? Ça ne lui apportera rien. Le joueur n’a pas besoin de communication ; il a besoin de coaching. Il a besoin qu’on lui explique ce qu’il aurait pu faire autrement, quelles étaient ses autres options. Un feed-back doit fonctionner dans les deux sens : de l’entraîneur aux joueurs, et vice-versa. En tant qu’entraîneur, j’apporte quelque chose au groupe, mais le groupe m’apporte aussi énormément, il me permet de progresser. »
Tomber pour mieux se relever
Le parcours de Miron Muslić en tant qu’entraîneur n’a pas été un long fleuve tranquille. Dix années consécutives de défaites lui ont valu d’être licencié par ses anciens clubs, ce qui ne l’empêche pas de porter un regard positif sur cette période. « L’échec est indissociable de la réussite. Il faut pouvoir tomber pour se redresser ensuite et prétendre au succès. Même si je ne souhaite à personne de connaître l’échec, c’est pourtant un apprentissage unique. Qu’a-t-on fait de bien ? Qu’a-t-on fait de mal ? L’échec n’est pas un problème à partir du moment où on est capable de se relever et de se donner une nouvelle chance. »
Un monde en miniature
Si la grande diversité qui caractérise une équipe de travail (ou de football) est enrichissante, elle peut aussi être un défi. Comment Miron Muslić gère-t-il cet aspect ? « C’est la partie la plus simple de mon job », affirme-t-il. « Les vestiaires d’un club, c’est un monde en miniature. Notre équipe compte douze nationalités différentes, nos joueurs viennent de tous les horizons. Nous poursuivons toutefois un objectif commun, et c’est quelque chose de magique. Si le monde ressemblait à notre équipe, avec un même objectif en tête, la vie serait plus simple. »
Être soi-même
Tous unis face au même but à atteindre : si l’ambition est louable, les choses sont sans doute plus faciles à dire qu’à faire... Comment arriver à mettre toutes ces personnalités en phase, du mâle alpha aux joueurs les plus discrets ? « Il faut leur laisser la liberté d’être ce qu’ils sont », commente Miron Muslić.
« Ils doivent avoir le courage de rester fidèles à eux-mêmes, sans chercher à être quelqu’un d’autre. Nous n’essayons donc pas de créer un “joueur type du Cercle” au départ de ce groupe très diversifié aux antécédents variés. Tous sont des joueurs du Cercle, à leur manière. Tous apportent à l’équipe ce qui leur est propre, un peu comme on compose un menu parfaitement équilibré au départ de différents ingrédients. »
Ceci n’est pas un one-man-show
Composer constamment entre le court terme – le match suivant, qui s’avère toujours décisif – et le long terme exige certaines compétences. Pourtant, l’entraîneur insiste avant tout sur l’importance de son staff. « Nous sommes loin du one-man-show. Seul, je n’arriverais à rien. Nous sommes neuf ou dix dans le staff, chacun avec ses tâches et ses responsabilités. Nous sommes tous experts dans un domaine particulier dont nous assumons la responsabilité. C’est une des raisons pour lesquelles j’aime tant travailler avec le Cercle. »
La pression est un privilège
Être sur le terrain chaque semaine a de quoi vous mettre à rude épreuve. Une pression que Miron Muslić ne considère pas comme négative, que du contraire. « La pression est un privilège », assure-t-il. « Être footballeur ou entraîneur professionnel est un honneur. Jouer chaque semaine pour une dizaine de milliers de spectateurs n’est pas une pression, c’est un privilège. La pression, c’est le quotidien. Travailler 40 à 45 heures par semaine et avoir quand même des difficultés à joindre les deux bouts, c’est ça la véritable pression. Le football, lui, est un divertissement. C’est pourquoi je ne cesse de répéter au staff et aux joueurs de rester humbles. »