Après un certain temps, bon nombre de travailleurs issus du secteur des soins de santé se plaignent de douleurs physiques au bas du dos et aux épaules liées au positionnement et au déplacement souvent manuels des patients. Selon une étude réalisée par l’UZ Gent et Liantis en collaboration avec Ergotrics, l’utilisation de coussins d’air réduirait fortement la charge physique du personnel soignant.
Dans le bloc opératoire, les professionnels de la santé sont bien souvent amenés à déplacer et à positionner les patients manuellement. Prenons par exemple le cas d’une opération du dos : le patient, préalablement allongé sur le dos, doit être installé sur le ventre sur des blocs de support. Pour ce faire, le personnel soignant bascule la personne sur le ventre. Or, cette procédure appelée « proning » est très éprouvante pour le bas du dos.
Les conséquences de cette importante contrainte physique ne sont pas à prendre à la légère. Elle peut en effet nuire au bien-être du personnel au travail, entraîner des chutes voire pousser certains collaborateurs à quitter l’organisation. C’est pourquoi Liantis et l’UZ Gent se sont associés pour examiner dans quelle mesure l’utilisation de coussins d’air pourrait réduire la charge physique du personnel soignant.
Dans le cadre de l’étude, nous avons demandé à six sujets de basculer un patient sur le ventre à l’aide de trois techniques différentes en vue de les comparer.
La première méthode consistait à utiliser des coussins d’air. Le sujet devait faire rouler le patient depuis le lit vers la table d’opération en utilisant un coussin gonflable incliné. Celui-ci avait au préalable été placé à la hauteur de la poitrine et du bassin du patient, puis gonflé de manière à faciliter le positionnement correct de la personne.
Les autres méthodes étaient quant à elles purement manuelles. La deuxième technique consistait à déplacer le patient du lit à la table d’opération à l’aide d’une planche de transfert. Une fois le patient installé sur la table, le sujet le retournait à l’aide d’un drap de glisse, puis le soulevait pour ensuite venir placer les blocs sous son corps. Enfin, la troisième technique consistait à basculer le patient allongé sur le dos dans son lit directement sur les blocs préalablement positionnés sur la table d’opération.
Pour chacune des trois méthodes, nous avons mesuré la tension musculaire au niveau des épaules et de la zone lombaire du sujet afin d’identifier la technique la moins éprouvante physiquement.
En comparaison avec les méthodes strictement manuelles, l’utilisation de coussins d’air a permis de réduire sensiblement la tension musculaire chez les sujets testés. Grâce à cette technique, la contrainte au niveau des épaules ainsi que des muscles du dos est nettement moins importante.
On peut donc en conclure qu’en évitant les gestes manuels lors du positionnement des patients, les travailleurs issus du secteur des soins sont moins susceptibles de souffrir de douleurs lombaires au travail.
Mais qu’apporte donc une telle étude, concrètement ? Selon Filip Buckens, ergonome à l’UZ Gent, la réalisation de cette étude présente un intérêt multiple : « Avant toute chose, les résultats indiquent clairement que certaines techniques manuelles devraient être bannies du bloc opératoire. Elles sont en effet beaucoup trop éprouvantes pour les soignants, et il existe de bonnes alternatives pour éviter ces contraintes physiques. »
Et ce n’est pas tout : « Pour pouvoir mettre en pratique une théorie fondée sur l’intuition, il convient d’obtenir des résultats qui la confirment en tout point. Si l’on veut convaincre les chirurgiens d’appliquer cette nouvelle technique dans leur bloc opératoire, elle doit être validée par des résultats positifs, ce qui est justement le cas dans notre étude, puisque nous avons réellement pu démontrer la valeur ajoutée de l’utilisation de coussins d’air. »
Dans le cadre de cette étude, les chercheurs se sont concentrés uniquement sur les contraintes physiques occasionnées par le déplacement des patients, mais il existe bien entendu de nombreuses autres tâches pouvant entraîner une surcharge physique pour le personnel soignant.
C’est d’ailleurs ce que nous confirme Stephan Tomlow, spécialiste en matière d’ergonomie chez Liantis : « Afin d’obtenir une vue d’ensemble des contraintes physiques des travailleurs actifs dans le secteur des soins de santé, nous devrions également examiner toutes leurs autres tâches demandant un effort physique. Nous pourrions alors prendre davantage de mesures en tenant compte de ces résultats. Nous espérons toutefois avoir pu contribuer à l’amélioration des conditions physiques de travail dans le secteur des soins grâce à cette étude. »