Jelle, expert du vécu, donne des conseils et astuces aux conseillers en prévention
Le conseiller en prévention interne se consacre à faire de l’organisation pour laquelle il travaille un meilleur environnement professionnel. Ainsi, les collaborateurs peuvent rester au travail plus longtemps et en meilleure santé. Pour y parvenir, vous souhaitez sans doute souvent soumettre de nouvelles idées ou de nouveaux projets à votre équipe de management, votre direction ou votre CEO. Comment surmonter certains obstacles et assurer le bon déroulement de ces entretiens ? Jelle Neyens, directeur de la prévention et du bien-être chez Liantis, nous livre ses meilleurs conseils.
Directeur de la prévention et du bien-être chez Liantis. C’est le titre officiel du poste de Jelle Neyens. Rien ne laissait présager qu’il évoluerait dans le monde fascinant du bien-être au travail. Il a débuté sa carrière dans un environnement très différent, chez un producteur international de bière. Il a gravi les échelons et a fini par occuper un poste de direction. Il a rejoint Liantis il y a six ans. « Dans mon expérience professionnelle précédente, j’avais l’habitude de me retrouver au sein d’équipes que je ne connaissais pas, à parler de sujets en dehors de mon expertise. J’ai rapidement constaté qu’il était enrichissant, tant pour moi que pour l’équipe, de poser des questions naïves et de parvenir à des conclusions fondées au moyen d’un raisonnement logique. Cela me permettait aussi d'expliquer rapidement pourquoi je voulais opérer certains changements ou faire évoluer certaines choses. Dans le domaine de la prévention et du bien-être, j’ai donc pu compenser le manque d’expérience concrète par des années d’expérience dans la mobilisation des personnes et des équipes », explique Jelle.
Un mot revient souvent au cours de la conversation avec Jelle : l’écoute. « Vous devez consciemment prendre le temps d’écouter et seulement ensuite prendre la parole. Cela vaut envers vos collègues, mais certainement aussi envers votre direction, votre équipe de management ou votre CEO. Si vous abordez avec eux une législation complexe, utilisez un jargon compliqué ou des injonctions du type « il faut faire ci, il faut faire ça », il y a de fortes chances que vous vous heurtiez à un mur », explique Jelle. Une approche plus efficace à ses yeux, c’est d’apprendre à bien connaître son public cible et savoir ce qui l’anime ou le motive. « Par exemple, les bénéfices jouent probablement un rôle clé pour votre direction, ou encore, votre CEO souhaite engager et garder des collaborateurs très motivés. Pensez à adapter votre approche en conséquence. 'Si vous visez la productivité, cher/chère CEO, je suggère que nous nous concentrions sur ces trois initiatives liées au bien-être qui auront un effet immédiat sur celle-ci.' Voilà comment vous pouvez comprendre la réalité de votre public cible et faire avancer les choses dans le même temps. »
Comprendre l’univers de votre public cible, c’est fait. Mais comment faire aboutir tous les projets ? « Là, je vais devoir vous décevoir. C’est tout bonnement impossible. Il s’agit en réalité de bien choisir les chouchous à sacrifier, ou en d’autres termes : la réflexion mène au succès. Bien sûr, tout ce qui figure dans la législation sur le bien-être est important, mais il n’est pas réaliste de tout entreprendre à la fois. Selon les informations concernant votre public cible, vous pouvez bien sûr faire de meilleurs choix. Essayez-vous de présenter et de faire passer mille et une choses ? Vous courez alors le risque de submerger vos interlocuteurs d’informations et de ne rien obtenir du tout. En faisant de bons choix, les chances d’obtenir un bon résultat augmentent. »
Nous avons donc déterminé ce que nous voulons exactement soumettre. Mais comment nous y prendre au mieux ? « Tout au long de ma carrière, j’ai remarqué certaines choses qui font bel et bien la différence. Premièrement, une bonne préparation et évaluation de votre idée sont essentielles. Cela prend du temps et peut être frustrant, mais essayez de trouver au préalable des partisans au sein de votre organisation. Peut-être pourront-ils soutenir ou même renforcer votre argumentation lors de la réunion. Si une autre personne, par exemple le responsable de production, propose votre idée, ce sera encore plus impressionnant. C’est en fait ce qui fonctionne le mieux, car pour un CEO, constater que tout le monde adhère à une idée est quelque chose de convaincant. Deuxièmement, convaincre en donnant beaucoup d’éléments est souvent contre-productif. Ne vous retranchez donc pas dans votre propre jargon. C'est parfois un défi. Je commets moi-même souvent l’erreur et au terme de la présentation, je constate que j’ai présenté ce sujet dans des termes spécialisés et de manière inutilement complexe. Demandez-vous donc ce que votre interlocuteur veut entendre et ce qu’il est important qu’elle retienne ? Terminons par le conseil le plus important : n'abordez jamais votre projet par des « Il faut faire ci, il faut faire ça. » Mieux vaut mettre en lumière la valeur ajoutée que votre initiative peut apporter et son importance. »
Très souvent, en tant que conseiller en prévention interne, vous êtes « pris entre deux chaises ». Par exemple, vous faites partie d’un comité pour la prévention et la protection au travail qui comprend à la fois des membres de la direction et des syndicalistes. Et il arrive qu’ils soient en désaccord. « Si vous savez qu’il peut y avoir des différends sur un certain point, essayez de mettre ces thèmes sur la table - sans pointer du doigt. Naturellement, il est essentiel de vous y préparer et de faire preuve d’empathie pour les deux camps afin de pouvoir présenter les différents points de vue sans avoir à vous ranger d'un côté ou de l'autre. Essayez de jouer le rôle de médiateur et osez expliciter objectivement et diplomatiquement en quoi quelque chose rejoint les attentes de chacune des deux parties. Ici aussi, la maxime s’applique : équipé de langage humain et d'une bonne dose d’empathie, vous irez loin. »
Très souvent, les collaborateurs préparent des présentations PowerPoint compliquées pour étayer leurs idées. « Je ne le fais pas souvent, ou du moins pas la première fois que je présente une idée. Vous courez le risque que quelqu’un s’attarde sur un détail de votre présentation et envoie dès lors toute l’idée aux oubliettes. Commencez plutôt par un argumentaire votre idée générale. Par la suite, une présentation peut aider à définir, par exemple, un plan de suivi », explique Jelle. « Par ailleurs, il n’y a rien de mal à suivre son intuition lors d’une présentation : vous ne vous sentez pas sûr de vous parce que vous devez utiliser un PowerPoint, ou vous savez que vous n’êtes pas doué pour visualiser les choses ? Alors ne le faites pas ! Si vous voulez que votre idée soit claire, il faut éviter tout ce qui pourrait en compromettre la limpidité. »
Malheureusement, tous les projets ne se déroulent pas sans heurts. Un investissement peut ne pas avoir eu l’effet escompté, ou bien cela n'a suscité que peu d’intérêt auprès des collaborateurs. Que faire ? « Soyez toujours honnête dans votre évaluation. Quand les choses se déroulent bien, mais aussi et surtout quand elles se déroulent moins bien. Ainsi, vous faites preuve de transparence et vous pouvez toujours en tirer des leçons. Pourquoi cela n’a pas fonctionné ? N’avons-nous peut-être pas la culture adéquate, les bonnes personnes ou les bons matériaux ? Et si cela risque de nous freiner à nouveau à l’avenir, ne devrions-nous pas y remédier ? Vous pouvez ainsi essayer de transformer quelque chose de négatif en quelque chose de positif. Et voilà que, sans vous en apercevoir, vous venez peut-être de lancer l'un de vos nombreux autres « chouchous » !